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Ostéoporose et équilibre acido-basique : faisons le point

Posté le 23 Avr, 2012 dans Articles Santé, Conseils en santé et nutrition au quotidien | 11 commentaires

Ostéoporose et équilibre acido-basique : faisons le point

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L’ostéoporose est une maladie dont les facteurs nutritionnels sont multiples. Les produits laitiers et leur teneur en Calcium sont souvent mis en avant, pourtant le rôle protecteur des fruits et des légumes est bien établi à travers des études épidémiologiques, cliniques et expérimentales. Les sels organiques présents dans ces végétaux permettent en effet de lutter contre l’acidification tissulaire liée notamment à l’excès de consommation de sel de table (chlorure de sodium) et de protéines. Le bénéfice sur la santé osseuse des fruits et légumes pourrait aussi être lié à certains polyphénols et les vitamines C, E et K. 

Equilibre acido-basique et ostéoporose

La minéralisation de nos os ne se résume pas à la quantité de calcium que nous consommons. Notre capacité à déplacer ce calcium du sang vers les cellules et à le fixer sur la trame osseuse dépend de nombreux facteurs, dont l’équilibre acido-basique, témoin de la régulation par notre organisme du pH sanguin. Celui-ci reste rigoureusement compris entre 7,38 et 7,42. Cette étonnante stabilité contraste avec les multiples phénomènes vitaux qui tendent à acidifier le sang, tels que l’activité musculaire, la respiration, les désordres digestifs, les déséquilibres alimentaires, le stress, l’âge, l’altération du fonctionnement des reins … Notre organisme arrive à maintenir malgré tout ce pH sanguin constant en « puisant » dans les cellules les minéraux alcalinisants, tels que le calcium, le magnésium et le potassium.

Le rôle de l’os dans le maintien du pH plasmatique est complexe. Il agit comme un réservoir de substances alcalines (carbonates, citrates…) susceptibles d’être libérées en cas de déséquilibre de la balance acido-basique. La multiplicité et la durée des circonstances acidifiantes au cours de la vie, dont les habitudes alimentaires modernes, peut conduire à un phénomène de spoliation du squelette au profit du plasma : les personnes ostéoporotiques ont généralement un bilan calcique sanguin normal !

Protéines et ostéoporose

Une alimentation trop riche en protéines génère en effet une charge acide sous forme d’acides sulfuriques et phosphoriques éliminés dans les urines. Il a ainsi été calculé que chaque gramme de protéine absorbé induit une perte calcique additionnelle quotidienne équivalente à 1,75 mg. L’excès d’acidité pourrait être responsable d’une perte de 15 % de masse osseuse sur dix ans. Nous parlons toutefois ici d’un excès de consommation de protéines alimentaires : rappelons que les apports protéiques quotidiens recommandés sont de 1 à 1,2g par kg de poids corporel, et que les protéines d’origine végétale sont moins acidifiantes que celles d’origine animales. Une réduction excessive de protéines dans le but de limiter l’acidose serait néfaste pour la santé et pour l’os, fait d’une trame de protéines sur laquelle se fixe le calcium.

Sodium, Potassium et ostéoporose

Une consommation excessive de chlorure de sodium – le sel de table – augmente également les risques d’excès d’acidité, notamment en modifiant le rapport Sodium/ Potassium (Na/K). Ce dernier est important car il traduit la teneur de l’alimentation en sels organiques contenus dans les fruits et légumes.

Le Potassium sous forme de sels organiques (citrate, malate, oxalate ou tartrate de Potassium …) est le principal cation* issu des fruits et légumes. Il peut agir sur l’os via son pouvoir tampon, c’est-à-dire sa capacité à compenser les variations de pH, évitant ainsi de solliciter le Calcium osseux en cas d’excès d’acidité. Les fruits ont néanmoins une teneur plus faible en Potassium (150-200 mg/100 g) que les légumes (300 mg/100 g). Les produits animaux contiennent également du Potassium mais ce dernier est dépourvu de fonctions alcalinisantes car associé à ce que l’on appelle des anions** (ions Cl et PO4).

L’alimentation de nos ancêtres paléolithiques permettait d’atteindre un rapport Na/K d’environ 0.003 à 0.1, assurant ainsi un bon équilibre de la balance acido-basique.

Le rapport Na/K moyen de l’alimentation moderne occidentale  est d’environ 1.8 à 4.3 , traduisant ainsi une tendance inquiétante à l’acidité tissulaire et donc à la prévalence de l’ostéoporose ou à la perte urinaire de minéraux, tel le Magnésium dont on connaît les rôles essentiels au bon fonctionnement de l’organisme.

Expérimentalement, l’administration orale chez la femme ménopausée de bicarbonate de Potassium réduit l’élimination de Calcium et de Phosphore, améliorant ainsi la balance calcique, réduit l’excrétion urinaire d’hydroxyproline (marqueur de résorption de l’os) et accroît l’ostéocalcine (marqueur de formation de l’os).

En pratique

  • Veiller à consommer des végétaux (fruits et légumes) quotidiennement en privilégiant une cuisson à la vapeur ou à l’étouffée pour préserver leur teneur en Potassium.
  • Identifier le PRAL*** des aliments : plus il est positif, plus l’aliment sera acidifiant. Et inversement.
  • Bien distinguer le goût « acide » du pouvoir « acidifiant » d’un aliment. Le citron, bien qu’acide au goût, est très riche en citrate au pouvoir alcalinisant.
  • A l’inverse, réduire la consommation de produits salés : sel de table, charcuterie, fromage, plats cuisinés, pains, etc. Il existe désormais des produits de charcuterie allégés en sel disponibles en grande surface et par ailleurs souvent issus de la filière « bleu blanc cœur » garantissant un enrichissement de l’alimentation du bétail en graines de lin pour leur teneur en oméga 3 (de même que vous trouverez facilement des œufs issus de cette filière identifiable grâce à un logo bleu blanc rouge). Pourquoi pas réaliser vous-même votre pain ? Il existe de nombreuses machines à pain vous permettant de contrôler le taux de sel utilisé : vous pouvez le réduire en substituant tout ou partie du sel par des épices aux vertus antioxydantes. Ce conseil est bien évidemment valable pour l’ensemble de votre alimentation quotidienne. Notre appétence pour le gout salé n’est pas innée, mais acquise : en prenant l’habitude de manger moins salé, vous serez de plus en plus sensible au sel, jusqu’à trouver des aliments que vous consommiez auparavant beaucoup trop riches en sel ! Pour exemple, le pain italien est souvent moins riche en sel et nombre de Français l’estiment sans gout. Et vice-versa : tout est une question d’habitude…
  • Limiter toute consommation excessive de protéines alimentaires.
  • Pour les puristes : remplacer le sel de table classique (chlorure de sodium) par du sel réalisé à partir de citrates de sodium.
  • Concernant la consommation de produits laitiers : aussi importante soit sa teneur en Calcium, n’oublions pas que le fromage reste un aliment riche en sel et en protéines. Ainsi, limiter sa consommation et – pourquoi pas – associer quelques fruits secs afin de contrebalancer son effet acidifiant tout en préservant le plaisir du palais ? Privilégier par ailleurs les fromages frais (plus le taux de matière sèche est élevé, plus le fromage est généralement riche en graisses, en chlorure de sodium et en protéines), de préférence à base de lait de chèvre ou de brebis.

 

Anthony Berthou

 

*Un cation est un ion possédant une charge électronique positive, tels l’ion Calcium et l’ion Potassium.

**Un anion est un ion possédant une charge électronique négative, tels l’ion Chlorure Cl.

*** L’indice PRAL (de l’anglais Potential Renal Acid Load) est une manière d’indiquer la charge acide rénale potentielle d’un aliment, à savoir son effet acidifiant ou alcalinisant sur l’organisme.

 

Références

N Engl. J. Med., 1994, 330, 1776-1781.

Am. J. Clin. Nutr., 2003, 77, 504-511.

Am. J. Public Health, 1997, 87, 992-997.

Tableau de quelques indices PRAL (Potential Renal Acid Load)

 

Aliments acides

PRAL

Aliments alcalinisants

PRAL

Parmesan

+34.2

Concombre

-0.8

Dinde

+9.9

Brocoli

-1.2

Poulet

+8.7

Pomme

-2.2

Œuf

+8.1

Ananas

-2.7

Porc

+7.9

Tomate

-3.1

Bœuf

+7.8

Cerises

-3.6

Spaghettis

+7.3

Pomme de terre

-4.0

Corn flakes

+6.0

Carotte

-4.9

Riz blanc

+4.6

Céleri

-5.2

Pain blanc

+3.7

Banane

-5.5

Lentilles

+3.5

Epinard

-14.0

Pois

+1.2

Raisins

-21.0

 


Source : Journal of the American Dietetic Association, 1995, 95, 791-797.

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11 Commentaires

  1. Bonjour,

    J’ai suivi des cours de nutrition en école d’ingénieur (agro-alimentaire), et nous n’avons pas abordé en profondeur cette notion d’équilibre acido-basique. J’avoue que vous m’apprenez quelque chose de très intéressant ici, je suis même étonnée qu’on n’en parle pas plus dans tout ce qui concerne l’équilibre alimentaire.

    j’ai vu une vidéo d’une américaine qui mettait en avant son mode alimentaire basé que cet équilibre acido-basique. Ce dernier joue-t-il d’autres rôles que dans l’ostéoporose ?

    A bientôt.
    Nadège

  2. Bonjour,

    un nombre très important d’études ont contredit la théorie acide-base, d’une part dans le lien supposé entre alimentation « acidifiante » ou riche en protéines et ostéoporose et, d’autre part, dans le lien supposé entre équilibre acide-base et blessure ou performance chez le sportif.

    L’excrétion de calcium par les urines n’est pas nécessairement liée à une « déminéralisation osseuse » par exemple.
    En matière de sport, les études portant sur « alimentation acide/base » et « performance » se comptent sur les doigts d’une main (allez, des deux mains peut-être) et elles ne sont pas concluantes. Les études qui montrent un effet positif sur la performance utilisent des compléments de bicarbonate à des doses inatteignables par l’alimentation, qui entraîne un risque de troubles gastro-intestinaux.

    Je vous met un lien pubmed en exemple : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23551968 Mais il y en a beaucoup d’autres.

    • Bonjour Gregoire,

      Pour répondre à vos questions :
      -Une alimentation n’est pas acidifiante en raison d’une consommation excessive de protéines mais en raison d’un déséquilibre entre les facteurs acidifiants et alcalinisants. Ceci s’observe en effet lorsque la consommation de protéines, notamment d’origine animale, ne s’accompagne pas d’une consommation suffisamment conséquente et appropriée d’aliments alcalinisants, tels que les légumes ou les eaux riches en bicarbonates par exemple. Ainsi l’alimentation moderne est acidifiante par excès de consommation de sel, de produits laitiers tels que les fromages et de sucre, ainsi que par insuffisance de consommation de légumes.
      -La consommation de protéines de qualité est la première mesure préventive de l’ostéoporose puisque la minéralisation osseuse ne peut se faire que par fixation de calcium sur une trame protéique, déficitaire dans l’ostéoporose. Une alimentation apportant de 1g à 1,5 g / kg de poids de forme est indispensable, idéalement en associant protéines d’origine animale et protéines d’origine végétale, est donc nécessaire ce qui est rarement atteint dans les circonstances habituelles de l’alimentation moderne.
      -Enfin rappelons que l’alimentation n’est pas la seule responsable de l’ostéoporose et que le stress, l’activité sportive intensive, les troubles respiratoires, l’altération de la fonction rénale, etc .., participent aux fuites minérales.

      Concernant le fait que l’excrétion de calcium par les urines n’est pas nécessairement liée à une « déminéralisation osseuse » . En effet : ce sont là deux conséquences concomitantes des phénomènes tampons qui maintiennent le pH sanguin constant aux environs de 7,4. Cette impériosité biologique impose des mouvements de calcium, magnésium et potassium du milieu intracellulaire vers le milieu interstitiel, puis le milieu vasculaire. Or les cellules les plus riches en calcium, entre autre, sont celles du squelette. Ainsi le maintien obligatoire du pH sanguin entraine-t-il une spoliation des minéraux intracellulaires, la formation de complexes sanguins et leur filtration par les reins. Ceci se vérifie par les bilans urinaires et le contrôle du pH des urines.
      Si les études bibliographiques sur la performance sportive manquent, le lien avec des lésions musculo-tendineuses et quant à lui bien établi et vérifié cliniquement par la pratique. Il n’est pas illogique de penser en outre que la production accrue d’acide lactique par l’effort musculaire et d’acide urique par hypercatabolisme et rhabdomyolyse sollicite de façon majorée les systèmes tampons chez le sportif. La consommation de bicarbonates n’est pas l’unique mesure micronutritionnelle et les complexes minéraux et les mesures nutritionnelles font parties de l’arsenal thérapeutique approprié. Vous avez tout à fait raison sur le fait que l’ingestion de bicarbonates à forte dose puisse être à l’origine de troubles digestif, c’est pourquoi l’apport de sels désacidifiants sous forme citrate représente une solution alternative intéressante (Street D., Nielsen J.J. et al., J Physiol, 2005, 566.2, 481–489). Concernant l’aspect bibliographique, je suis tout à fait intéressé par l’étude de méta-analyses de votre part.

      Sportivement.

      Anthony

  3. Bonjour
    une urée trop élevée durant un régime hyperprotéinée peut-elle diminuer en consommant
    davantage de citrons par ex ?

    • Bonjour,

      Le citron possède un effet alcalinisant du fait de sa teneur en citrates notamment : en ce sens il contribue effectivement à un meilleur équilibre de la balance acide-basique en cas d’acidité excessive. Lors d’un régime hyperprotéiné, l’hyperuricémie n’est pas directement liée au statut acide-basique mais à une concentration importante en acide urique : la consommation d’aliments alcalinisants (légumes et fruits, dont le citron) permet de soutenir l’organisme pour éliminer ces excès d’acidité, même si le mécanisme est différent.

      Anthony

  4. Bonjour
    l’équilibre acido-basique à t il un effet sur la croissance humaine?

  5. Me revoilà maintenant sur le bon blog! J’ai demandé sur le blog glycémie, ce que vous pensiez de la paléo-nutrition. Ce sera sans doute mieux de me répondre ici.
    Si j’ai bien compris, plutôt que de viser les apports calciques des laitages, il vaut mieux veiller à consommer plus de fruits (en particulier les plus acides) et légumes (en particulier avec la viande). Est-ce juste? Et donc quels laitages sont permis à la ménopause, en quelles quantités?
    Cordialement

    • Bonsoir Sylnie,

      Effectivement, le plus important pour optimiser votre balance calcique est d’optimiser votre balance acido-basique avant tout (apport de végétaux crus et cuits à chaque repas, éviter les excès d’apports d’aliments riches en chlorure de sodium et de protéines animales). Pour les fruits, tous sont conseillés : la banane et les pruneaux sont par exemple très riches en potassium et sels alcalinisants. Pour les laitages, tout dépend de votre situation, mais d’un point de vu général, les laitages à base de lait de chèvre, brebis et soja en quantité modérée sont adaptés (1 à 2 produits laitiers par jour).

      Cordialement,

  6. Bonjour,

    J’ai une question concernant les produits laitiers. Pourquoi conseillez-vous de privilégier les laits et fromages de chèvre ou brebis à ceux de vache? Il y a t-il une différence au niveau de l’apport calorique et/ou en AGS? Ou cela est-il du à la présence de facteurs de croissances (IGF-1) davantage présent dans les produits issus de la vache?
    Merci par avance pour votre temps et vos réponses.
    Cordialement

  7. Bonjour,

    J’avais lu avec attention votre article et pour moi le lien acidité et ostéoporose n’était plus à démontrer.

    je reviens ici car voila ce matin je tombe sur cette étude:

    T. Jia, L. Byberg, B. Lindholm et col. (2014) Dietary acid load, kidney function, osteoporosis, and risk of fractures in elderly men and women, Osteoporos Int.

    Qu’ en pensez vous? l’etude est elle assez poussée? Ou doit-on attendre la confirmation de ces résultats par d’autres d’études similaires?

    Merci encore pour votre blog,

    Cordialement

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