Sacralisé par les uns, diabolisés par les autres, on ne sait plus quoi penser de ces fameux produits laitiers. Autrefois mis sur un piédestal au niveau nutritionnel, notamment du fait de sa richesse en calcium, il est aujourd’hui de plus en plus décrié à cause de son implication potentielle dans les troubles digestifs et inflammatoires chroniques. Il existe à ce titre une confusion très fréquente entre l’intolérance au lactose et l’hypersensibilité aux caséines laitières. Qu’en est-il vraiment ? Faisons le point.
Explorez le sujet en détail en cliquant sur les articles ci-dessous.
Les produits laitiers sont-ils nécessaires pour conserver des os solides ?
Lorsque l’on évoque l’intérêt nutritionnel des produits laitiers, le premier élément venant à l’esprit de la plupart est leur teneur en calcium, en faisant des aliments indispensables à la prévention contre l’ostéoporose. Consommer 2 à 3 produits laitiers par jour serait ainsi un réflexe essentiel à adopter pour conserver des os solides tout au long de la vie.
Les études scientifiques indépendantes ne semblent pas toutefois pas aussi catégoriques sur le sujet. Certaines d’entre-elles révèlent qu’au contraire, il n’existe pas de corrélation directe entre la consommation de produits laitiers et la prévention de l’ostéoporose.
D’autres facteurs, jouant des rôles clés dans le maintien d’une bonne santé osseuse, sont à l’inverse peu communiqués. Faisons le point.

L'intolérance au lactose
Le lactose est le sucre naturellement présent dans le lait. Pour être digéré, il nécessite une enzyme spécifique, la lactase. Si certains individus peuvent produire une quantité importante de cette enzyme toute au long de leur vie, d’autres voient au contraire leur capacité diminuer progressivement après l’enfance.
L’intolérance au lactose se manifeste par des troubles digestifs (ballonnements, douleurs, diarrhées) après la consommation de lait, quelle que soit son origine : lait de vache, de chèvre, de brebis, etc. Cette intolérance au lactose est toutefois souvent confondue avec l’hypersensibilité aux caséines laitières, se manifestant par des effets plus systémiques, d’ordre inflammatoire et immunitaire.
Voyons tout ceci en détails.

L'hypersensibilité aux caséines de lait de vache
Il existe une confusion fréquente entre l’intolérance au lactose et l’hypersensibilité aux caséines laitières.
Les caséines, principales protéines du lait, existent sous plusieurs formes dont les β-caséines A1 et A2. La proportion entre les différentes familles de caséines varie selon la race des vaches. Leur digestion génère la libération d’un peptide (BCM-7) potentiellement impliqué dans des réponses immunitaires et inflammatoires inadaptées chez certaines personnes. Je vous propose de faire le point sur ce sujet.
Certains passages pourront peut-être paraître complexes, mais ils sont nécessaires pour bien comprendre les mécanismes impliqués dans l’hypersensibilité aux caséines laitières. Ils permettent d’y voir plus clair dans la cacophonie nutritionnelle actuelle sur ce sujet, sur la base des données scientifiques actuelles.

Facteurs de croissance, pesticides et antibiotiques dans le lait : qu'en est-il ?
Au-delà du lactose et des caséines, le lait de vache contient d’autres composés bioactifs dont l’impact sur la santé reste débattu. Parmi eux, l’IGF-1 (un facteur de croissance) et certaines immunoglobulines sont suspectés d’être impliqués dans des risques accrus de cancers, de troubles immunitaires et de maladies neurodégénératives. Des études observationnelles évoquent notamment un lien entre la consommation de lait et une augmentation du risque de cancer de la prostate, de lymphomes non hodgkiniens et de maladie de Parkinson.
Une autre question régulièrement évoquée est celle de la présence de contaminants dans les laits issus d’élevages intensifs comme les pesticides, les POP et les résidus d’antibiotiques.

Que penser des laits de chèvre et de brebis ? Du lait cru ?
Il n’y a pas de lait animal idéal pour l’homme adulte
Lorsque l’on évoque la suppression du lait de vache, les produits laitiers à base de lait de chèvre, de brebis (voire de jument, de chamelle ou d’ânesse) sont souvent proposés comme des alternatives idéales. Le sont-il vraiment ?
Un autre sujet souvent évoqué est celui de la tolérance du lait crû par rapport au lait UHT, dont le procédé de traitement serait impliqué dans l’augmentation des risques d’intolérance des produits laitiers à base de vache.

En pratique : faut-il éviter les produits laitiers ?
À l’image du gluten et des blés modernes, je ne peux que vous inviter à modérer votre consommation, notamment si vous souffrez de troubles inflammatoires ou immunitaires. La place centrale accordée actuellement au lait de vache dans l’alimentation humaine adulte n’a pas de fondement scientifique objectif. Il ne s’agit pas pour autant de diaboliser cet aliment et de le supprimer de votre alimentation si vous l’aimez et si vous n’êtes pas sujet(te) aux différents troubles évoqués.
Je vous conseille néanmoins de privilégier des produits laitiers fermentés, comme le yaourt et le fromage au lait cru (attention toutefois à sa forte teneur en sel), issus de races contenant plutôt des caséines A2 (Guernesey et Jersiaise), nourries et élevées dans des conditions de vie respectueuses de leur bien-être. Vous pouvez également vous orienter vers des produits laitiers à base de lait de chèvre ou de brebis, ou pourquoi pas d’ânesse.
Si en revanche, vous êtes concerné(e) par des troubles intestinaux ou inflammatoires chroniques sans origine identifiée, vous pouvez tester l’éviction totale de tout produit laitier pendant environ 6 semaines, afin d’analyser l’évolution de vos symptômes digestifs, immunitaires et/ou inflammatoires. Si vous allez mieux, vous pourrez alors les réintroduire en petites quantités (sous forme fermentée et d’origine fermière) et surveiller le retour éventuel des symptômes au cours des semaines à suivre.
Vous souhaitez aller plus loin ? Vous former à l'approche systémique de la nutrition ?
Faut-il arrêter les produits laitiers? Le gluten ? Éviter trop d’oeufs ? Manger vegan ? Pratiquer le jeûne intermittent ? Consommer des compléments alimentaires ? Je réponds à chacune de ces questions sur la base des dernières données validées par la science dans ma formation en e-learning -> Les grandes questions d’actualité en alimentation.
💡 Connaissez-vous les peptides opioïdes ?
ll est fréquemment évoqué l’implication potentielle du gluten et des caséines laitières dans la survenue de troubles tels que les troubles du spectre autistique ou les TDA/H, voire la schizophrénie¹⁻⁵. Pour plusieurs auteurs, le point de départ se situerait comme souvent dans l’intestin. Il est en effet fréquemment constaté une augmentation de la prévalence des troubles digestifs, en particulier du transit, chez les enfants souffrant de troubles du spectre autistique⁶⁻¹⁰. Ces troubles sont par ailleurs souvent associés à une perturbation de la réponse immunitaire, orientée vers la production de cytokines pro-inflammatoires (IL-12, TNF-alpha)¹¹⁻¹³

Bibliographie
- Sun Z, Cade JR. A Peptide Found in Schizophrenia and Autism Causes Behavioral Changes in Rats. Autism. 1999;3(1):85-95. doi:10.1177/1362361399003001007
- Whiteley P, Haracopos D, Knivsberg AM, et al. The ScanBrit randomised, controlled, single-blind study of a gluten- and casein-free dietary intervention for children with autism spectrum disorders. Nutr Neurosci. 2010;13(2):87-100. doi:10.1179/147683010X12611460763922
- Erić-Nikolić A, Matić IZ, Dordévić M, et al. Serum DPPIV activity and CD26 expression on lymphocytes in patients with benign or malignant breast tumors. Immunobiology. 2011;216(8):942-946. doi:10.1016/j.imbio.2011.01.005
- Marí-Bauset S, Zazpe I, Mari-Sanchis A, Llopis-González A, Morales-Suárez-Varela M. Evidence of the gluten-free and casein-free diet in autism spectrum disorders: a systematic review. J Child Neurol. 2014;29(12):1718-1727. doi:10.1177/0883073814531330
- Hartman RE, Patel D. Dietary Approaches to the Management of Autism Spectrum Disorders. Adv Neurobiol. 2020;24:547-571. doi:10.1007/978-3-030-30402-7_19
- Valicenti-McDermott M, McVicar K, Rapin I, Wershil BK, Cohen H, Shinnar S. Frequency of gastrointestinal symptoms in children with autistic spectrum disorders and association with family history of autoimmune disease. J Dev Behav Pediatr. 2006;27(2 Suppl):S128-136. doi:10.1097/00004703-200604002-00011
- Ibrahim SH, Voigt RG, Katusic SK, Weaver AL, Barbaresi WJ. Incidence of gastrointestinal symptoms in children with autism: a population-based study. Pediatrics. 2009;124(2):680-686. doi:10.1542/peds.2008-2933
- Chaidez V, Hansen RL, Hertz-Picciotto I. Gastrointestinal problems in children with autism, developmental delays or typical development. J Autism Dev Disord. 2014;44(5):1117-1127. doi:10.1007/s10803-013-1973-x
- Kushak RI, Buie TM, Murray KF, et al. Evaluation of Intestinal Function in Children With Autism and Gastrointestinal Symptoms. J Pediatr Gastroenterol Nutr. 2016;62(5):687-691. doi:10.1097/MPG.0000000000001174
- Lefter R, Ciobica A, Timofte D, Stanciu C, Trifan A. A Descriptive Review on the Prevalence of Gastrointestinal Disturbances and Their Multiple Associations in Autism Spectrum Disorder. Medicina (Kaunas). 2019;56(1). doi:10.3390/medicina56010011
- Coury DL, Ashwood P, Fasano A, et al. Gastrointestinal conditions in children with autism spectrum disorder: developing a research agenda. Pediatrics. 2012;130 Suppl 2:S160-168. doi:10.1542/peds.2012-0900N
- Jyonouchi H, Geng L, Davidow AL. Cytokine profiles by peripheral blood monocytes are associated with changes in behavioral symptoms following immune insults in a subset of ASD subjects: an inflammatory subtype? J Neuroinflammation. 2014;11:187. doi:10.1186/s12974-014-0187-2
- Samsam M, Ahangari R, Naser SA. Pathophysiology of autism spectrum disorders: revisiting gastrointestinal involvement and immune imbalance. World J Gastroenterol. 2014;20(29):9942-9951. doi:10.3748/wjg.v20.i29.9942
Partagez cet article !